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Initiation grandes voies en terrain d’aventure dans le Caroux (Du 13 au 16 octobre 2017)

Jeudi soir, gare de Montpellier : Un Zaphira cinq place et deux strapontins nous attendent dans une ruelle sombre derrière la gare, du moins s’il ne se fait pas la malle faute de frein à main. On cale Marie entre deux cordes à double puis on part sur une route bien sinueuse qui nous mène à Mons-la-Trivalle. Arrivé à la maison, c’est le grand luxe, mais  Mickaël, impressionné, insiste pour dormir dans le grenier.

Vendredi : David, notre super BE (et auteur du topo) nous retrouve, et nous allons ensemble sur un premier site école dans les gorges d’Héric où nous lui montrons nos compétences d’escalade hors du commun. Il nous enseigne les premières techniques de pose de points (friends et coinceurs) et nous encourage à ne pas suivre les voies toutes tracées du site. Le gneiss des gorges s’y prête particulièrement bien.
L’après-midi, nous partons sur l’arête de la Tête de Braque ; une première grande voie où nous n’utilisons pas les broches en place (Laurent/Volker, Mickaël/Gaétan, Carène/Marie/David). Nous rodons l’organisation du matériel, sangles, coinceurs et friends au baudrier ou sur les porte-matériels, le constat est unanime : il y a du monde et c’est lourd.

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David nous laisse un peu de lecture pour nos soirées : une caisse remplie de vieux topos. Sur un vieil exemplaire, nous découvrons le docteur Azéma (voir plus bas).

Samedi : Nous partons en grande voie avec Bruno (BE) et Pierre (guide). L’Arête des Charbonniers, en 4+ : Pierre/Michael/Gaétan, Laurent/Volker, Bruno/Carène/Marie.
Gaétan part en tête, chemine et cherche l’emplacement du relai indiqué dans le topo. Il ne le trouve pas, mais qu’importe : un simple béquet doublé d’un friend suffira amplement. Dans les anecdotes : Michael tire au clou et se fait traiter de “cafiste” ; nous croisons sur notre route quelques pitons, peut-être placés là par Gaston Rebuffat ; malgré les précautions, un friend est abandonné sur place : bien coincé dans une fissure, nous n’arriverons pas à le récupérer malgré les tentatives de trois personnes.

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Volker et Laurent surgissent d’une forêt sur vire très dense

Descente scabreuse dans un ravin avant de se perdre dans la forêt, nous ne trouvons ni chemin ni cèpes, au grand dam de Bruno (pour les cèpes). Il fait presque nuit lorsque nous arrivons à la voiture. Nous retrouvons David au bar de Mons-la-Trivalle, pour un apéro en terrasse. Au moment de nous quitter, Bruno nous laissera des marrons et une bouteille de rouge de son cru. Ce soir-là, en approfondissant nos recherches, nous apprenons que le docteur Azéma a mystérieusement disparu dans un “accident“ de voiture.

Dimanche : Une nouvelle grande voie (Le Minaret – Arête nord) en 4+/5 : Bruno/Laurent/Mickaël, Carène/Gaétan, Pierre/Marie/Volker.

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Au départ de la voie, Mickaël enlace un buisson. En terrain d’aventure, il n’y a pas d’interdits

S’en suit un passage raide avec une sensation différente : au lieu d’espérer la prochaine broche, il suffit de poser un point. Néanmoins nous trouvons dans certains passages délicats une ou deux broches en place. Nous en profiterons et les utiliserons pour nous rassurer. Autrement, à nous voir grimper seulement sur friends, Bruno aurait été “vert” (expression locale).

 

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Volker s’applique à placer un Camalot no.2.

La voie se termine sur un passage un peu athlétique et très aérien que Bruno fera faire trois fois à Laurent “pour pas qu’il aille faire le cabri après”. Il profite de Laurent suspendu dans le vide pour nous montrer l’assurage au demi-cab’ et comment le bloquer par un nœud de mule pour être tranquille.
Descente dans un ravin, on parle encore cailloux et cèpes.

Lundi : David est de retour dans le groupe. Volker/Gaétan, David/Carène/Mickaël, Laurent/Marie se lancent dans l’arête de Rocher Marre, semi-TA, L2 avec son filon de pegmatite remarquable et L3 avec son passage du cheval rouge : après un dièdre, il convient de chevaucher un grand rocher rouge découpé, comme dans l’ascension de la Meije, paraît-il.

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Volker et Gaétan continuent dans la Petite Suisse en deux longueurs pendant que le groupe travaille les manips de cordes (nœud de mule, remontée sur corde et mouflage).

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David nous dédicace le topo. Nous reviendrons avec grand plaisir.

En bonus : Nous vous proposons en totale exclusivité une enquête, on ne peut plus sérieuse, menée le temps de ce week-end si dépaysant, emprunt de vin très local et de châtaignes tombées d’un petit C15 rouge tout près de notre gîte :

Enquête à Mons : sur les traces de la disparition prématurée du docteur Azéma, pionnier de la grimpe au Caroux

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Un épais mystère plane, sous les cumulus qui survolent le mont Caroux depuis le 11 juillet 1955, date de la subite disparition du bon docteur Azéma, qui a tant fait pour l’ouverture de ce site en commençant à y grimper dès 1912. Afin d’y voir plus clair, Vertical 12 a missioné, dans les parois de gneiss, entre forêts de pins et de chênes verts, un groupe d’enquêteurs, sous couverture «cafiste» pour la discrétion. Un texte étrangement poétique lu dés notre arrivée, dans le très original topo local, datant de 1956 (soit très curieusement juste une année précisément après la disparition de notre homme…), trouvé dans la caisse à topos d’un certain David, nous a tout de suite interpellé pour ouvrir l’enquête. Rien que du texte pour décrire les voies avec le portrait en page de garde du bon vieux médecin . Y aurait-il un code à déchiffrer ? Le docteur aurait-il fait une étrange et malencontreuse rencontre dans le massif, ayant entraîné sa disparition ? Pour essayer d’y voir plus clair, voici un extrait de la page 15 de ce fameux topo abandonné dans la caisse : «Si vous abordez le Caroux, dès l’approche de ses contreforts, vous observerez que sa plus étroite crête découpe sur un espace considérable et contre un ciel d’azur pâle, un inoubliable relief que distinguent même les équipages qui cabotent de Sète à Port-Vendres. Dédaigneux de préciosités et de métaphores, marins et montagnards appellent tout uniment cette curiosité géologique la femme morte ou encore la femme couchée. Et il est vrai que, si l’on embrasse du regard la la chaîne du Caroux, une gigantesque femme couchée paraît nettement se profiler sur le faite. La tête de la gisante penche vers le nord -ouest au-dessus de l’abîme, tandis qu’un enchevêtrement de rochers et d’arbustes évoque les plis et les boucles d’une chevelure abondante. Le col est proportionné, arqué, semble-t’il, sous le poids de la tête. Une poitrine saillante, des genoux légèrement fléchis parachèvent l’illusion.»
Une affaire de mœurs ? Et le texte de poursuivre sur la même page :
«Selon le mythe, c’est ici sur ce Caroux, que Cébenna découragée, lasse d’exhaler sa peine, se serait étendue pour mourir. La Nature, quelquefois secourable, aurait affranchi de ses chagrins et de ses épreuves cette géante trop tendre en lui composant pour toujours un cœur et un visage de pierre. Aussi, insensible aux aux déceptions sentimentales, depuis des millénaires, la fille des Titans repose là.»
Le docteur Azéma, fin connaisseur de l’anatomie humaine, aurait t’il lui aussi subi cette pétrification ? Par qui ? Par quoi ? Comment ? Et surtout où ?
Alors, pour en avoir le cœur net, on y est allé à l’assaut de ce massif pour comprendre tout cela, en construisant maints relais un peu partout comme notre pionnier, et en suivant ses derniers itinéraires. Nous avons trouvé des ossements très étranges, en descendant des ravins escarpés. Rien que du bon vieux mouflons au final. Le manque d’eau a fait proliféré depuis peu des algues vertes aux odeurs entêtantes dans le fond des gorges de cette grande Dame qui viennent ralentir notre progression. Les cris des oiseaux sont passés au crible, grâce à l’analyse scientifique de notre spécialiste ornithologue. Ils nous ont finalement conduits à un repère très bien caché où, pour ramasser de précieux cèpes, il nous a fallu moufler, moufler et encore moufler pour comprendre enfin que notre mission allait être beaucoup plus longue que prévue. L’intrusion inattendue d’un faux électricien dans notre gîte sous des prétextes fallacieux, nous a conduit immédiatement à penser que nous étions à présent, sous l’étroite surveillance de la mafia locale du Grand Cèpe, et qu’il fallait disparaître rapidement… pour mieux revenir. Et nous reviendrons pour enfin trouver la vérité sur la disparition du bon docteur Azéma sur ce grand cailloux à la croupe si féminine, avec pour plus d’efficacité un outil redoutable de la navigation maritime, le mariner double. A suivre, lors de notre prochaine mission en Terra Aventura… !